Le modèle d'entreprise à la française ne fonctionne plus : état des lieux et proposition de nouveaux paradigmes efficients
Le modèle d'entreprise à la française ne fonctionne plus : état des lieux et proposition de nouveaux paradigmes efficients
Tactiques de stress, crise économique, souffrance au travail, pressions sur les dirigeants, les managers, les salariés voire la société; tout se mélange: comment sortir de cette spirale ?
Je désire vous faire partager quelques unes de mes réflexions issues de ma formation initiale et continue, de mon parcours professionnel, de ma vie de femme, des échanges nombreux que j’ai pu avoir avec des experts, dirigeants, DRH ou salariés, de ma pratique de la photographie humaniste, bref de mes convictions qui se sont ainsi forgées au fil du temps et qui ne sont pas figées mais qui forment une base solide.
Je pense que nous avons dans une grande majorité et tous métiers confondus, une vision commune de la place de l’humain dans l’organisation. Renaud Sainsaulieu, fondateur de l’APSE - Association des Professionnels en Sociologie d’entreprise - et du DESS « Développement social d’entreprise et Gestion de l’emploi » à Sciences Po Paris dont j’ai eu la chance de suivre les cours m’inspire encore et toujours, et je dirais encore plus aujourd’hui.
J’espère nourrir et éclairer, à mon niveau, le débat en présentant ci-après quelques idées et pistes de réflexion.
Tout d’abord, je vous recommande au passage vivement l’ouvrage de Christophe LAVAL « Plaidoyer pour la reconnaissance au travail - La reconnaissance non monétaire : une pratique managériale au service du mieux-être et de la performance ». Vous pouvez vous procurer ce livre si ce n’est déjà fait via le site www.livrebusiness.com . Pour précision, je n’ai aucune commission sur les ventes de cet ouvrage.
L’auteur, expert reconnu mondialement en management qui a dirigé Entreprise & Personnel et qui fut dirigeant ou DRH dans des entreprises du CAC 40 dit « avoir acquis l’intime et profonde conviction que la reconnaissance au travail est un élément clé de l’identité et de la santé des personnes ainsi que de la croissance, de la transformation et de la performance économique des organisations. »
C’est toujours d'actualité même si semblant passé aux oubliettes avec France Télécom/Orange et ses plus de 40 suicides et du groupe La Poste avec 70 suicides répertoriés à ce jour liés aux conditions de travail. Peut-être est-ce ici le cas d’entreprises plus médiatisées, celles-ci en cachant bien d’autres ? On sait déjà trop que oui.
La souffrance au travail existe, tout le monde le sait maintenant. Les entreprises mettent en place, et parfois trop hâtivement, divers programmes pour y remédier. Il est temps d’agir, oui. Rapidement certes mais surtout en se posant les bonnes questions. L’éthique de l’entreprise doit être pensée, sa liberté aussi.
« Au delà d’un plaidoyer pour la reconnaissance au travail, ce livre est le chaînon qui manquait entre l’indispensable performance économique et le mieux-être dans l’entreprise qui reste le meilleur moyen d’y parvenir. »
L’objectif de l’auteur est de promulguer un véritable nouveau management dans l’entreprise au travers de la reconnaissance au travail tant formelle – salaire maintenu, rehaussé, augmenté – qu’informelle, c’est-à-dire non monétaire aussi et il souligne le aussi. Tout est repensé, les salariés sont alors vraiment reconnus par leurs managers de proximité, eux-mêmes reconnus par leur hiérarchie etc.
L’objectif est que les salariés comme les managers ne subissent alors plus de stress négatif, ni d’humiliation ou de harcèlement, ni de surdose de travail forcément toxique, liés à un management global « déplorable » encore trop répandu aujourd’hui, lui même engendré, entre autres mais pas que, au contexte socio économique.
De nombreuses et récentes études internationales sont pourtant unanimes :
1. en matière de management, la France se positionne depuis longtemps en avant dernière position sur l’échiquier mondial.
2. en matière de productivité, y compris avec les 35h, les français figurent à l’inverse en tête de peloton. Mais pour encore combien de temps ?
Deux constats qui ne peuvent que nous pousser à nous interroger sur le modèle d’entreprise français : « Les salariés sont pompés jusqu’à l’os et sont dans le même temps perpétuellement lynchés ».
« La corde est si tendue qu’elle va craquer » entend-on un peu partout. Ce qui se passe aujourd’hui dans nos organisations est en effet intenable et ingérable. Cela impacte fortement de plus, on le sait, sur les résultats des entreprises via une démotivation générale de l’ensemble des salariés, managers y compris; et donc à une baisse logique de la contribution de chacun aux performances économiques, à de l’absentéisme ou du présentéisme comme seule parade, à des maladies générées par ces conditions de travail inhumaines telles que le devenu tristement célèbre "burn out" et à un fort turn-over. Et cela a un coût qui se chiffre en milliards d’euros chaque année.
Avec cette approche de la reconnaissance au travail, les salariés peuvent enfin et veulent alors de nouveau avoir envie de s’investir dans leurs entreprises car le climat social, respectueux de chacun, apaisé et créatif; et les conditions de travail au sens large qui en découlent sont optimaux. Du coup les entreprises deviennent plus performantes.
On peut alors imaginer sortir progressivement de la crise. Cette piste est simple et non simpliste.
Petite alerte : par reconnaissance au travail, il est bien dit qu’elle ne soit pas de façade car les salariés sont quasi tous dotés d’un esprit critique de plus en plus développé et conscients de leurs droits et ils sentent aussitôt si il y a supercherie. Si cette reconnaissance au travail n’est que poudre aux yeux, on court au fiasco économique et social : l’avertissement est majeur. Pour illustration, une conciergerie ou un pressing de plus n’apportera rien si ce n’est l’exaspération des équipes au bord de l’implosion qui attendent bien autre chose. Il semble utile de rappeler également que l'engouement pour le bonheur au travail via les Chief Happiness Officers est sans nul doute louable mais pour l'instant purement récréatif et par trop "superficiel". En effet, ce qui rend un professionnel heureux, c'est d'abord et avant tout de reconnaître son travail et le sens de son travail.
Pour ce faire, l’impulsion doit venir d’en haut, c’est a dire des dirigeants de tous bords qui se doivent de montrer la voie par la mise en place de politiques éthiques non autoritaires et démocratiques qui ne soient pas que des paroles en l’air mais s’appuyant sur des faits et des pratiques vérifiés et concordant avec leurs discours, discours plaidoyer pour une vraie reconnaissance au travail et non en caricaturant basé sur le discours critiquable et surtout rejeté aujourd’hui à l’unanimité du « tu marches ou tu crèves ».
L’approche est originale car elle fait du rapport salariés/entreprises un rapport gagnants/gagnants.
Cette approche économique, sociale et politique bénéfique tant pour l’économie que pour le bien-être de tous ne peut que rejaillir en cascades sur les salariés, les dirigeants, les chômeurs et donc sur toute la population car les conditions sont alors réunies pour que la croissance économique reprenne et que la société soit démocratiquement plus juste et plus agréable pour tous.
Le travail n’a pas de sens au travers du seul mérite individuel car c’est ici une conception dangereuse qui favorise une vision élitiste qui divise les équipes, nourrissant méfiance et coups bas et qui au final rend toute entreprise amorphe et inefficace tant le climat social est désagrégé et donc non efficient.
L’entreprise, pour être performante, et non plus qu’à simple court terme, en pressant ses salariés comme des citrons, se doit de concilier prise en compte de l’humain, du social et de l’économique.
Tout est lié, tout doit être relié. Il est important d’anticiper et d’agir enfin efficacement pour solutionner les risques psychosociaux et économiques.
Le travail n’a de sens qu’en respectant et en reconnaissant les capacités de chacun, quel qu’il soit et quelles qu’elles soient. Nous avons tous des capacités différentes et complémentaires : valorisons les pour chacun et misons ainsi sur un modèle type d’entreprise où coopération prime sur compétition interne. Les salariés travaillent avec plaisir quand ils sont profondément reconnus et non soupesés et évalués. Ce sont les hommes et les femmes qui font les performances de leurs entreprises: il semble devenu donc indispensable de les prendre en considération, de les respecter et de les reconnaitre. Vraiment. Rappelons-le.
La nouvelle éthique de l’entreprise, voire de l’organisation au sens large, est une éthique respectueuse de tous ceux qui la composent, y compris en respectant l’Environnement. C’est une éthique citoyenne, à visage humain et responsable de ses salariés. C’est à cette condition que l’entreprise sera alors de nouveau performante au travers d’un bien-être de ses salariés.
La liberté de l’entreprise passe avant tout par une reconnaissance globale et complète au travail de toutes et tous afin que le rapport salariés/entreprises soient un rapport gagnants/gagnants; rapport bénéfique tant économique que social.
Est-ce la troisième voie ?
J’espère sincèrement avoir contribué à mon niveau à nourrir de ma réflexion la vôtre, modestement mais authentiquement.
Valoriser l’Humain dans les faits et par nos pratiques tout en tenant compte de la réalité socio économique : soyons novateurs.
Mots clés: Ressources Humaines, Crise, Société, Reconnaissance non monétaire, Christophe Laval, Renaud Sainsaulieu, Démocratie, Sens, Motivation, Économie, Direction Générale, Climat social, Productivité, Innovation, Lien social
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